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Sentier 1 : Lien autant que lieu
Trois lettres avec pour thématique le sentier, rédigées à partir d'une reflexion conduite par le Parc National des Ecrins. Une réflexion non ininterressante à l'heure où les calanques s'acheminent vers un nouveau statut.
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Le massif des Écrins ne s’est jamais parcouru qu’à pied. Privilège, curiosité, territoires impossibles, tout cela à la fois et plus encore : le sentier est un patrimoine, le rapport ancien des hommes avec leur montagne. Il est chemin de la connaissance : On en apprécie le tracé, l’audace, la sagesse. On le questionne sur ses origines, pour quels usages pionniers de la montagne.
Avec le sentier, on entre aujourd’hui de plain-pied dans la vie de la montagne : il conduit aux parcelles de cultures, aux prairies de fauche, à la forêt, aux alpages et pas seulement au lac, au col ou au refuge.
La gestion des sentiers dans le coeur d'un Parc national est une responsabilité forte.
Inventaire, cartographie, états des lieux, entretiens, travaux de restauration, de protection, ouvrages, passerelles, relevés, descriptions, signalisation… Le sentier mobilise de très nombreux savoir-faire qui évoluent avec le rapport de notre société à la montagne.
En ce sens, le sentier demeure voie de communication et conduit à travailler avec tous : agriculteurs, éleveurs, bergers, forestiers, gardiens de refuges, accompagnateurs, guides de haute montagne, maires…
Sentiers, sentes, traces, passages, drailles, chemins, tous ont une histoire. Randonner, c’est être dans les pas pionniers de ceux qui, trois millénaires plus tôt ou voici seulement un siècle et demi, ont exploré ces territoires, cherchant à s’y installer. Dure école qui les fit bâtisseurs, éleveurs, pasteurs, chasseurs, cueilleurs, porteurs… pluriactifs par nécessité.
À l’origine, les itinéraires tracés sur les cartes sont des initiatives montagnardes : voies de communication entre vallées, itinéraires de liaison entre villages, passages de contrebande pour éviter l’impôt, usages de l’espace à des fins agricoles, pastorales, minières…
Chemins de gens de peu, riches seulement de cueillette et d’élevage, que le tourisme fera profondément évoluer, les sentiers n’étaient pas de divertissement pour les colporteurs, cristalliers, agriculteurs et transhumants. Randonner, c’est reprendre le pas de tous ceux-là, c’est chercher à comprendre, c’est s’inscrire dans une histoire.
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De quand datent les sentiers ?
On peut facilement imaginer que les premiers hommes qui traversaient un massif ont utilisé les passages les plus faciles, les cols les moins élevés. Voilà quelque 9000 ans, aux Ecrins, des hommes ont campé au fond du vallon du Fournel ... Dès leur véritable installation, les hommes ont eu besoin d’aménager des axes pour circuler plus facilement avec des animaux et parfois avec des “véhicules”.
Ainsi ont été peu à peu créés
-les sentiers pour relier les lieux de vie et faire du commerce, pour conduire les troupeaux sur les pâturages les plus hauts,
- les voies romaines pour préserver l’empire conquis,
- les sentiers forestiers pour bâtir et se chauffer,
- les sentiers miniers pour l’exploitation,
- les sentiers militaires pour faire la guerre ou se protéger de l’ennemi ...
La trace des sentiers suit l'humanisation des paysages.
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À travers les Alpes, les “Via” romaines étaient de véritable “routes”, en partie pavées, créées par les Romains pour relier la Gaule à la péninsule italienne : la via Domitia conduisait de Milan à
Arles par Sisteron, Gap, Briançon et Montgenèvre. De là rayonnaient les voies secondaires (Queyras, Verdon, etc...)
Le sentier du Roy, en rive gauche de la Guisane (Briançonnais), a été façonné au XVIIIe siècle à la demande du maréchal Berwick pour se prémunir de la Savoie ennemie.
Au milieu du XVIIe siècle, la révocation de l’édit de Nantes en 1685 va entraîner la fuite des protestants par les sentiers des cols (la Valette, les Prés nouveaux, etc ). On les appelle alors les chemins des protestants. Ils relient le Dauphiné (La France) à la Savoie (duché de Savoie, hors royaume). Ils existent toujours.Et les “bornes”, marquées de la fleur de lys coté Isère et de la croix de Savoie, coté Savoie, aussi.
En bien d’endroits, des sentiers d’altitude sont particulièrement aisés à parcourir en raison de leur profil. Leurs origines sont liées à l'intervention de l’État, à la fin du XIXe siècle, pour contrer l'érosion des sols et les crues. Des équipes d’ouvriers recrutés dans les vallées travaillent six mois par an. Des sentiers sont construits afin d’accéder à tous les sites. Leur profil ne devaient pas dépasser 15 % de pente en long et leur largeur (l’assiette) devait être d’un mètre, dimensionnement imposé pour le passage des mules chargées de plants (mélèzes, alisiers, cèdres de l'Atlas, pins à crochets, et cembro). Ces sentiers dits “muletiers” sont de véritables constructions avec murs de soutènement en pierres taillées.
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Le passage du facteur enfin a laissé son nom à de nombreux itinéraires. Comme les chantiers hydroélectriques abandonnés avant la 1ère guerre : sentier de l'Energie dans le Mercantour.
Quant au sentier du Ministre qui conduit dans le Valgaudemar, aux refuges de Vallonpierre et Charbounéou, c'est une boutade ! Aucun ministre n'a jamais arpenté ce confortable tracé pour anes ... ce qui n'est point le cas du sentier du Président, dans les calanques !
Marcher pour le plaisir...
Au milieu du XIXe siècle, la croissance démographique des vallées de montagne est à son apogée. Les ressources sont surexploitées et les disettes engendrent un exode important vers les villes... et parfois jusqu’à l’étranger (États-unis, Mexique...).
Si les villages sont désertés, les chemins qui les reliaient par la montagne le sont aussi. D’autant qu’en fond de vallées, la création de routes carrossables, de tunnels et des chemins de fer révolutionnent les modes de déplacement. Les sentiers se referment sous la végétation. Seul le passage des animaux conserve leur trace.
Avec l’arrivée des “excursionnistes” puis des alpinistes les sentiers prennent une nouvelle fonction. Grande nouveauté, on marche “pour le plaisir”...
Après les aristocrates à la conquête des Alpes (Whymper, Coolidge et autre miss Breevort), les congés payés démocratisent la pratique. Et les bivouacs précèdent les premiers refuges...
En 1936, les amoureux de la marche à pied et de la nature prennent le chemin des montagnes. Le Club alpin français existe déjà, depuis 1874. En 1904, une section d’excursionnistes est créée au sein du Touring Club de France qui regroupait déjà des cyclistes. En 1945, le Comité national des sentiers de grande randonnée (CNSGR) est créé. Son action est pérénisée par la Fédération française de randonnée pédestre (FFRP).
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